janvier 2024

Du Bénin à la France, une passion littéraire

Marthe étudie à Dijon, en master 2, grâce à la bourse d’excellence Eiffel du gouvernement français. Arrivée du Bénin l’année dernière, elle nous parle de son expérience et de sa passion de l’écriture. .

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Quel est ton rapport à la littérature ?
J’ai toujours beaucoup aimé lire depuis mon enfance. J’ai commencé à écrire vers l’âge de treize ans. J’étais beaucoup moins bonne dans les sciences dures, en revanche j’étais excellente dans les matières littéraires. Je suis entrée en seconde littéraire au Bénin. Après l’obtention de mon bac littéraire, j’ai passé un concours d’entrée à l’Ecole normale supérieure de Porto-Novo. J’y ai étudié pendant trois ans, on nous appelait les élèves-professeurs car on nous formait assidûment à la profession d’enseignant avec des cours de didactique et de psychopédagogie. Cette école est principalement dédiée aux langues et aux sciences humaines. Après l’obtention de ma licence professionnelle, j’ai enseigné le français dans un collège du Bénin pendant un an et j’ai postulé à la bourse Eiffel pour étudier en France.

Comment-vis tu la transition entre la France et le Benin ?
Étant introvertie et casanière, j’ai trouvé cela difficile au début. Quand je suis arrivée en France, je me suis retrouvée seule. Je croyais être habituée à la solitude mais c’était en fait difficile. Au Bénin, même quand je m’enfermais dans ma chambre, je me sentais quand même entourée de vie, de famille. Dans un autre pays, à huit heures de vol du mien, c’est différent. Le contact que j’ai maintenu avec mes parents m’a beaucoup aidée. Quand on est au Bénin, on a de la France l’idée d’une société individualiste, moins accueillante et, au premier abord, il y a une part de vérité. Cela étant, il ne faut pas généraliser, j’ai eu l’occasion de découvrir d’autres villes qui m’ont paru chaleureuses, Besançon par exemple.

Quelles différences as-tu remarqué dans l’étude de la littérature au Bénin et en France ?
Au Bénin, l’approche est plus englobante. Je me rappelle que nous avions fait une histoire de la littérature française à partir du Moyen-Âge. Puis, pour chaque siècle, nous avons étudié les formes littéraires les plus pratiquées, les grands auteurs, les grands thèmes. A côté de cela, on étudiait la littérature africaine d’expression française et la littérature orale béninoise. La littérature française n’était en fait qu’une partie de tout ce que nous faisions.
Quand je suis arrivée en France, je me suis rendu compte que ma culture littéraire était différente. On évoquait certains auteurs que je connaissais plutôt bien et d’autres dont je n’avais que vaguement ou pas du tout entendu parler. Je devais alors effectuer quelques recherches pour me mettre à niveau. Mais la base littéraire que j’ai acquise au Bénin m’a non seulement permis de décrocher la bourse, mais m’a également été, et m’est toujours d’une grande utilité. Quand je rencontre malgré tout des difficultés, je discute avec les professeurs. Et ça se passe bien.

Quel est ton sujet d’étude à l’université ?
Je m’intéresse beaucoup à la production littéraire des XVIe et XVIIe siècles. Lors de ma licence, un enseignant m’a fait aimer ces siècles. L’année dernière j’ai travaillé sur la poésie de Jean de Sponde, un auteur assez méconnu du XVIe siècle. Cette année j’axe les recherches sur la Bibliothèque des auteurs de Bourgogne de Philibert Papillon.

Écris-tu de la fiction ?
Mon seul écrit publié à ce jour a fait partie d’un livre collectif, le recueil béninois de nouvelles policières La Faille de Minuit paru en 2021. À côté de cela, j’écris beaucoup de poèmes (voir ci-contre). Je produis une littérature assez intimiste qui parle d’une certaine manière toujours de moi. Je ne me sens pas pour autant autrice. Je pense qu’il y a du travail à faire pour se dire auteur. Je pourrais le devenir si je fais évoluer ma pratique d’écriture et que je souhaite être publiée. Pour l’instant je n’écris que pour moi. Je suis encore en phase de construction.

Quels sont tes projets pour l’avenir ?
Il y a quelques années, je pensais enseigner à l’université au Bénin. A l’heure actuelle les choses sont un peu plus floues. Je m’inscrirai peut-être à l’IAE (Institut d’administration des entreprises) afin d’avoir une formation professionnelle. Le master lettres pourrait me garantir une place d’enseignant au secondaire au Bénin, mais pas à l’université.

Recueilli par Nasser Ferchichi
Tu chantes et le temps est beau
Quand tu t’es assis à la table des anges
J’ai vu deux nuages dessiner là-haut
Deux mains, deux sourires et deux voix étranges
Quand tu chantes le temps est beau.

Je sors et m’en vais par cette voie le matin
Le pinson me salue de son cri mélodieux
Cette symphonie qui flotte dans le jardin
Epand des airs et des chants gracieux.

Plus près la mésange, plus loin le merle
En chaque cri d’oiseau, chaque chant est le tien
Au-dedans de moi, la musique qui déferle
Rappelle une voix et cette voix t’appartient.

Hier, à deux pas de la rivière
Un oiseau, ce devrait être le coryphée,
Chanta d’un cri trop féerique une mélopée
C’était un rythme, une musique singulière.

Et mon cœur attendri se prit à penser
Que la mort, moins puissante que le souvenir,
Peut emporter le corps et l’espoir ravir
Tout. Sauf la voix de celui qu’on a aimé.

Pourrais-je jamais dire adieu à ce refrain
Qui court dans la campagne dès l’aurore ?
Si l’on peut oublier un visage et une main
Elle est éternelle, la voix qu’on adore.

Pour pérenniser le souvenir de ta voix
Le ciel fit l’oiseau et comme insatisfait
Créa toute l’espèce et quand elle chantait
Tendait l’oreille pour n’écouter que toi.

Tu es dans la montagne, près du marigot
Le matin, le soir, à l’autre bout du monde
Tu chantes partout où se trouve l’oiseau
Et mon cœur coule vers toi comme une onde.

Je m’arrête un instant et prête l’oreille
Ô musique adorée, Ô douce mélodie
Après le précieux don, après la vie
Tu étais, Dieu le sait, la seconde merveille.

Marthe Hounkponou
Poème écrit à Porto-Novo (Bénin) en janvier 2020

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